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Dunne & Raby, FAQ Design Critique.

Critical Design FAQ


Qu’est ce que le design critique ?

Le design critique utilise des propositions de design spéculatif, réflexif, pour défier les affirmations rapides, les préjugés et lieux communs sur le rôle des produits dans la vie de tous les jours. C’est surtout une attitude, un positionnement plus qu’une méthode. Beaucoup de gens en font sans avoir jamais entendu le terme design critique et ont leur propre façon d’exprimer ce qu’ils font. L’appeler Design Critique est juste un moyen commode de rendre cette pratique plus visible et d’en faire un sujet de discussion et de débat.
Son opposé est le design assertif : le design qui renforce le statut quo.

D’où vient-il ?

Le design en tant que critique a déjà existé sous plusieurs formes. Le design radical italien des années 1970 était très critique à l’égard des valeurs sociales et des idéologies du design dominantes. Le Design Critique s’est construit sur cette attitude et l’a étendue au monde contemporain.
Pendant les années 1990, il y a eu un mouvement général vers le design conceptuel qui a permis aux formes non commerciales du design comme le design critique d’exister plus facilement, surtout dans le domaine du mobilier car le design produit est plus conservateur et étroitement lié au marché de la consommation de masse.
Le terme Design Critique a été utilisé pour la première fois dans le livre d’Anthony Dunne Hertzian Tales (1999) et plus tard dans Design Noir (2001). Depuis, beaucoup ont développé leur propre variante.

Qui fait du Design Critique ?

Dunne & Raby et leur étudiants diplômés du Royal College of Art (RCA). James Auger, Elio Caccavale et Noam Toran sont probablement les plus connus mais il y a d’autres designers travaillant selon une approche similaire qui ne diraient pas que ce qu’ils font est du Design Critique : Krzysztof Wodiczko, Natalie Jeremijenko, Jurgen Bey, Marti Guixe…

À quoi sert le design critique ?

Principalement à nous faire réfléchir. Mais aussi à faire émerger les consciences, exposer des hypothèses, provoquer des actions, susciter le débat, et aussi à divertir, dans une dimension intellectuelle, comme la littérature ou le cinéma.

Pourquoi apparaît-il maintenant ?

Le monde d’aujourd’hui est incroyablement complexe, nos relations sociales, nos désirs, nos fantasmes, nos espoirs et nos peurs sont très différents de ceux du début du XXe siècle. Bien que beaucoup d’idées constituant la colonne vertébrale du design dominant se forment au début du 20e siècle.
La société a évolué mais pas le design. Le Design Critique est l’une des nombreuses mutations menée par le design afin de rester pertinent face aux changements technologiques, politiques, économiques et sociaux complexes du début du 21e siècle.

Quel rôle l’humour joue-t-il ?

L’humour est important mais souvent mal employé. La satire est le but recherché. Souvent, seuls la parodie et le pastiche sont atteints. Ils font référence à des formats déjà existants qui affichent trop clairement leur ironie. Le public doit expérimenter le dilemme. Est-ce sérieux ou non ? Réel ou non ? Un design critique réussi doit permettre de se forger sa propre opinion.
De plus, il ne doit pas faire la morale. Un usage habile de la satire et de l’ironie peut engager le public de manière plus constructive en faisant appel à son imagination et à son intelligence. Les humoristes politiques font très bien cela. L’humour noir fonctionne mieux.

Est-ce un mouvement ?

Non. Ce n’est pas vraiment un domaine qui peut être clairement défini. Il s’agit plus de valeurs et d’une attitude, d’une manière de regarder le design et d’imaginer ses possibilités au-delà des définitions étroites que nous en donnent les médias et les boutiques.

De quoi est-il le plus proche ?

L’activisme
Les contes moraux et philosophiques
Le design conceptuel
Les “futurs contestables”
Le design fiction
Le design qui pose des questions
Le design radical
La satire
Les fictions sociales
Le design spéculatif

Les pires idées fausses ?

Qu’il est négatif et anti-tout
Qu’il est seulement discursif et ne peut rien changer
Qu’il est comique
Qu’il n’est pas intéressé par l’esthétique
Qu’il est contre la production de masse
Qu’il est pessimiste
Qu’il n’est pas réel
Qu’il est de l’art

Mais ce n’est pas de l’art ?

Ce n’est définitivement pas de l’art. On peut dire qu’il emprunte massivement à l’art en termes de méthodes et d’approches mais c’est tout. On attend de l’art qu’il soit choquant, extrême. Le Design Critique doit être plus proche du quotidien, c’est de là que vient sa capacité à déranger. Trop étrange, il est assimilé à de l’art. Trop normal, il est intégré sans effort. Si on le regarde comme de l’art, il est plus facile à appréhender, mais s’il reste du design, il est plus dérangeant, il suggère que le quotidien que nous connaissons pourrait être différent, que les choses pourraient changer.

N’est-il pas un peu noir ?

Si, mais pas juste pour le plaisir. Le design ignore les émotions complexes et sombres. Beaucoup d’autres cultures acceptent que les gens soient complexes, contradictoires, parfois même névrosés, mais pas en design où nous voyons les gens comme des usagers obéissants et prévisibles et comme des consommateurs.
L’un des rôles du Design Critique est de questionner la gamme limitée d’expériences émotionnelles et psychologiques offerte par le design produit. Le design se contente de faire de jolies choses, c’est comme si tous les designers avait tous prononcé silencieusement le même serment d’Hippocrate. Cela nous empêche de nous engager pleinement et de faire du design pour les complexités de la nature humaine, qui bien sûr, n’est pas toujours bonne. Il s’agit plus d’utiliser le positif dans le négatif, pas du négatif pour lui-même, de diriger l’attention sur des possibilités effrayantes, comme un conte moral ou philosophique.

Et son avenir ?

Un des dangers qui guette le design critique est qu’il se termine comme une forme de design spectaculaire sophistiqué : 90% d’humour, 10% de critique. Il doit éviter cette situation en se posant des questions complexes et ambitieuses. Des domaines comme la futurologie pourrait bénéficier de ses visions plus rugueuses de la nature humaine et de sa capacité à transformer des questions abstraites en objets tangibles. Il pourrait aussi jouer un rôle dans les débats publics sur l’impact social, culturel et éthique sur la vie quotidienne des technologies émergentes et du futur.

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