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Gaetano Pesce, Objets élastiques, 1966

Extrait du catalogue Oggetti elastici di Gaetano Pesce, La Chiocciola Gallery, Padoue, 1966.


« vous êtes priés d’animer par votre présence les objets élastiques de Gaetano Pesce

de leur imprimer un mouvement… d’observer leur autodétermination (exposition d’observations élastiques)

il vous est demandé de ne pas penser que les objets exposés ont été créés : ils existaient dans notre réalité ; il s’agissait de les découvrir : l’œuvre en devenir est une découverte concrétisée

il vous est demandé de ne pas penser que les objets exposés sont le produit de la volonté précise de leur inventeur : face à eux il se trouve dans les mêmes conditions que vous (cf. a. genziani : artista come spettatore, palerme, 1964)

il est conséquent de repenser l’artiste non comme un créateur, mais comme le découvreur des nouvelles significations du temps… dans la nature rien n’est créé et rien n’est détruit… la forme est peut-être elle-même une création, mais le contenu est une découverte (peut-être)

bien des significations du temps sont encore à découvrir : vous êtes invités à commencer une nouvelle activité

il vous est demandé de ne pas voir les objets exposés comme des instruments du futur : ils représentent un aspect peut-être incomplet de la réalité actuelle : l’art ne devance pas son époque, mais la représente ; c’est la société qui assimile tardivement dans des contenus historiques et de nos jours la consommation rapide des nouvelles représentations artistiques est un phénomène positif

les objets exposés ne sont pas parfaits : ils n’aiment pas la perfection ; vous êtes priés de ne pas vous attarder sur leur forme (elle n’est qu’une convention qui représente le phénomène) mais d’enquêter sur la signification de leur autodétermination

ils vivent longtemps et se reproduisent par hasard : leurs images sont tout le contraire de la monotonie et n’aiment pas ce qui est standard

les objets exposés sont indépendants de tel ou tel groupe d’auteurs et s’affirment pour ce qu’ils sont

ils s’opposent au concept de l’art appliqué et, dans le contexte de cette mentalité, ils sont inutiles

vous êtes priés de ne pas voir dans les objets exposés, des positions stériles liées à un courant : ils sont élastiques

ceux qui ne sont pas d’accord avec la nouvelle pensée doivent élastiquement la tolérer : la tolérance est peut-être le nouveau grand but à atteindre après l’élasticisme

le nouvel art élastique existe indépendamment de ce que pense la culture officielle

le nouvel art élastique agit dans le domaine de l’indétermination, de l’insécurité, de la non-réalité unique, de l’adaptation continuelle à la continuelle évolution du temps : l’élasticisme déterminera donc, peut-être, une période qui sera caractérisée par l’incohérence

l’art élastique reconnaît l’authenticité historique des groupes, mais en la considérant indépendante de tel ou tel groupe d’auteurs elle demande aujourd’hui au mot « groupe » une fonction purement formelle

l’art élastique est reconnaissant envers ceux qui parviendront à l’exprimer à travers plusieurs langages dans un même objet : nous sentirons donc les images, nous verrons la musique, nous parcourrons la poésie, nous réciterons l’architecture, etc…

vous êtes priés de croire, en dernier lieu, que l’art élastique n’aime pas tout ce qui est :
  fixe, fini, immobile, bloqué, statique, renouvelable, constant, toujours identique, prévu, voulu, choisi, programmé,   probable, absolu, cohérent, continu, uniforme, monotone…

mais il aime tout ce qui est :
  mobile, interminable, unique, inconstant, souple, varié, relatif, improbable, non programmé, imprévu, non voulu,   non choisi, incohérent, discontinu, polytonal, toujours nouveau…

d’après les principes de flexibilité d’e. burton (dublin, 1965, p. 69) « ils (les objets élastiques) dépassent le concept de flexibilité pour entrer dans le domaine de l’élasticisme pur, par conséquent ces objets se définissent comme les archétypes d’un chaos contrôlé ».

le premier manifeste de l’architecture élastique a été lu par gaetano pesce lors d’une conférence tenue au congrès « la société de l’architecture » qui s’est tenu à jyväskylä (finlande) en juin 1965. »

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