Giuseppe Pagano est né en Croatie en 1896 (la Croatie n’était pas encore la Croatie mais une partie de l’Empire Austro-Hongrois).
Il s’engage dans l’armée italienne au début de la première guerre mondiale.
Au début de sa carrière, il est proche des partis politiques nationalistes et des pré-fascistes.
Il est diplômé en architecture de l’École polytechnique de Turin en 1924.
Il adopte un positionnement rationaliste dès la fin des années 20, sous l’influence du futurisme et de l’avant-garde Européenne.
Il adhère aux théories de l’Italie fasciste qui défendent l’idée d’une triade Unité-Abstraction-Cohérence.
Il est connu pour avoir s’être fait un virulent défenseur du rationalisme dans des articles parus dans Casabella, dont il devient directeur en 1933 (c’est lui qui change le nom de la revue La Casa Bella, qui devient Casabella).
[Toutes les couvertures Casabella, de 1928 à aujourd’hui]
Sans toutefois renier ses idées, il prend ses distances avec le parti Fasciste italien et ses architectes officiels (il propose une expression architecturale alternative de l’idéologie fasciste à la VIè Triennale de Milan en 1936). Il a toujours jugé douteuse la démarche de certains rationalistes (comme Gruppo 7 ou le critique Pier Maria Bardi) consistant à identifier l’architecture rationaliste au fascisme italien, mais il a néanmoins travaillé avec des architectes officiels du régime (comme Marcello Piacentini).
Giuseppe Pagano était aussi photographe. Il souhaitait rendre compte et conserver les traditions vernaculaires en Italie. Il créait des compositions qui parlaient de la qualité des matériaux, des instantanés de la vie quotidienne. Il célébrait ce qu’il considérait comme la “vraie” Italie, qui n’était pas celle que fabrique la propagande.
En 1943, il commence à critiquer ouvertement le régime qu’il avait soutenu. Il est pour cela capturé et enfermé dans le camp de concentration de Mauthausen où il meurt d’une pneumonie en 1945.
Architecture
Palazzo Gualino office building, Turin (avec Gino Levi Montalcini), 1928–29, pour le banquier Riccardo Gualino
Sist School, Turin, 1931
Villa Colli, Rivara (avec Gino Levi Montalcini), 1931
Hall d’entrée de la Gare Santa Maria Novella, Florence, 1933
Furniture and interiors for Il Popolo d’Italia offices, Milan, 1934
Physics building, Cité universitaire, Rome, 1935
Boarding School, Biella, 1936
Université Bocconi, Milan, (avec Gian Giacomo Predaval), 1941
Usine de bois Rivetti, Biella, (avec Gian Giacomo Predaval), 1942
Urbanisme
Projet de requalification urbaine de Via Roma, Turin (avec entre autres Gino Levi Montalcini et Ettore Sottsass), 1931
Master plan de E42 (avec Marcello Piacentini, Luigi Piccinato, Ettore Rossi et Luigi Vietti), 1937
Milano Verde (avec entre autres Franco Albini et Ignazio Gardella), 1938
Horizontal City Project, Milan, (avec Marescotti et Diotallevi), 1940
Pavillons et Expositions internationales
Pavillons pour l’Exposition Internationale de Turin, 1928: Gancia, Festivals et Mode, Chasse et pêche, Marine et Armée de l’air, Minéraux et Céramique.
Pavillon Italien à l’exposition internationale de Liège, (avec Gino Levi Montalcini), 1929
Steel Structure House (avec entre autres Franco Albini, Giancarlo Palanti)
Summer Hall (avec entre autres Ottorino Aloisio, Ettore Sottsass), Vè Triennale de Milan, 1933
Wagon de train ETR 200, Breda (with Gio Ponti), 1933
Conception d’exposition, scénographies
Hall de Honour and Icarus Room, Exposition d’aéronautique, Milan, 1934
Entrée principale et pavillon annexe, Exposition d’architecture rurale (avec Guarniero Daniel), Exposition de matériaux de construction (avec Guido Frette), VIè Triennale de Milan, 1936
Pavillion Italien à l’Exposition Internationale de Paris (avec Marcello Piacentini), 1937
Stand Rivetti, Wool Exhibits, National Textiles Exhibition, Circus Maximus, Rome (avec Angelo Bianchetti), 1938
Exposition Leonardo, Milan, 1939
Bibliographie
Flavia Marcello, Giuseppe Pagano, Design for Social Change in Fascist Italy, Intellect, 2020.
Giovannia D’Amia, « Le débat sur l’architecture rurale en Italie et l’exposition de Giuseppe Pagano à la Triennale de 1936 », In Situ [En ligne], 21 | 2013, [http://journals.openedition.org/insitu/10454].
« Dans l’Italie des années 1930, l’architecture rurale fait l’objet d’un débat dont sont partie prenante des ethnographes, des géographes, des architectes et des urbanistes. C’est la politique de réorganisation agraire du régime qui suscite l’intérêt pour ce thème, mais la réflexion est aussi liée à la recherche d’une approche italienne de l’architecture moderne. C’est dans ce cadre que s’inscrit l’exposition organisée par Giuseppe Pagano pour la VIe Triennale, dans le but de démontrer la valeur esthétique de la fonctionnalité et d’enquêter sur les rapports de cause à effet qui déterminent la forme architecturale. »
« En 1928, la même année où à commencé la publication de Domus, Marangoni fonde La Casa Bella, un magazine consacré aux intérieurs domestiques et aux arts décoratifs et industriels. La Casa Bella avait une politique éditoriale plus éclectique que celle de Domus. Après que Marangoni l’ai ouverte à une pluralité de voix, un groupe d’architecte dont Alberto Sartoris (1901-1998) et Giuseppe Pagano ont commencé à encourager un “rendez-vous avec la modernité”. Marangoni, reconnaissant que la ligne éditoriale s’éloignait de ses propres convictions, a abandonné ses fonctions de rédacteur en chef en 1929. Plusieurs années plus tard, le magazine pris le nom de Casabella, et sous la gouverne de Pagano et du critique Edoardo Persico, elle fit office de porte-parole vociférante du modernisme en Italie. »
« La VIè Triennale en 1936, organisée par Giuseppe Pagano et Edoardo Persico, était dédiée à l’architecture et au design rationalistes. Elle proposait des expositions sur l’habitat, l’ameublement et l’urbanisme pour sensibiliser le public aux possibilités de l’organisation rationnelle. Cette Triennale se différenciait des précédentes parce que le design rationaliste était visible même dans le plan d’ensemble de l’exposition depuis la décision de substituer trois grands secteurs à une myriade de petits pavillons jusqu’à la disposition des stands sur un plan en grille qui prévalait dans beaucoup d’expositions individuelles. La VIè Triennale incarnait dans ses formes mêmes la force des arguments en faveur du modernisme que Pagano et Persico défendaient depuis plusieurs années dans Casabella et représenta un moment triomphal du rationalisme, même si une période de résistance au modernisme n’allait pas tarder à suivre. »
«En dépit des nombreuses propositions en faveur de la production de masse d’habitats et de mobilier qui avaient eu lieu à la VIè Triennale, ce domaine était très peu développé en Italie. Pour la VIIè Triennale, en 1940, un an après que Mussolini ait conclu une alliance militaire avec Hitler (Le Pacte d’Acier), Pagano organisa la Mostra internazionale della produzione in serie (Exposition internationale de la Production en série) dans laquelle il présenta différents type d’objets fabriqués en masse, dans différents domaines allant du mobilier à l’habitat en passant par la céramique. Son intention était de dépasser l’objet unique en défendant l’idée que “une belle maquette est inutile si elle ne peut pas être correctement et parfaitement produite.” Pagano défendait le même type “standard” ou “uniforme” qu’Hermann Muthesius avait défendu 25 ans plus tôt lors de l’exposition du Werkbund à Cologne, ce qui nous montre la lenteur avec laquelle l’industrialisation a progressé en Italie par rapport à l’Allemagne. »
«Mussolini a alloué de considérables ressources au réseau ferré Italien, investissant massivement dans du nouveau matériel roulant et la réalisation de nouvelles lignes. C’est vers la fin des années 20 que se répandit la devise “Pendant le Fascisme, les trains arrivent à l’heure”. La ponctualité était, en fait, cruciale, et les ingénieurs payaient personnellement si leurs trains étaient en retard. Fiat a lancé une série de trains aérodynamiques entre 1934 et 1939, dont les derniers modèles adoptaient la grille arrondie et les fenêtres penchées vers l’arrière issues de l’industrie automobile. La société Breda, de Milan, (Società Italiana Ernesto Breda) a aussi lancé plusieurs machines profilées à la fin des années 30. Son ETR 200, première locomotive électrique en Italie, est entrée en service en 1936. Ce devait être à l’origine un train sans importance jusqu’à ce que le parti Fasciste decide de le transformer en un symbole du régime. Sa forme aérodynamique, qui avait été testée dans un tunnel de vent à l’école Polytechnique de Turin, lui permettait d’atteindre la vitesse de 200 km/h. Tout en étant également consultés au sujet de leur forme extérieure, la conception de l’intérieur des wagons a été commandée à Giuseppe Pagano et Gio Ponti, qui introduisirent le style rationnel et de nouveaux matériaux pour améliorer le confort des passagers. »
Extraits de Victor Margolin, World History of Design, Chapitre « Italy, Germany, the Soviet Union, and Portugal 1922-1940 », p. 312, 315, 317, 324. Traduction Frédérique Entrialgo.