The Great Exhibition of the Works of Industry of All Nations : un instrument politique d’expression du pouvoir et de développement économique.
Ce texte est extrait de Design, introduction à l’histoire d’une discipline d’Alexandra Midal (p.35-36). Il montre comment le contexte de la naissance du design est lié à une volonté d’affirmer une domination symbolique et économique ainsi qu’à une utopie sociale.
« Au cœur de Londres, à Hyde Park, du 1er mai au 11 octobre 1851, se tient la première Exposition universelle : The Great Exhibition of the Works of Industry of All Nations. Elle réunit et expose les dernières innovations industrielles, scientifiques, technologiques, architecturales et artistiques en un seul lieu. […] La Grande-Bretagne (…) pour la première fois de l’histoire, associe simultanément et au même niveau les arts, les sciences et l’industrie.
L’événement regroupe dans un lieu d’exposition temporaire autant de produits industriels que de produits artisanaux, concentrant ainsi la créativité de 14 000 exposants issus de plus de quarante pays pour la plupart industrialisés, et visant dans un non-dit explicite à montrer combien l’avancée britannique en la matière écrase les autres nations.
[…]
L’objectif politique et commercial des participants est d’inviter le grand public à la découverte d’un panorama de l’art et de l’industrie, d’établir une nouvelle ère de commerce international et de favoriser l’expansion des savoirs. En donnant un visage au rêve industriel, en entérinant la croyance en un monde meilleur grâce aux machines, l’exposition met en relief à la fois les aspirations et les craintes liées à la révolution industrielle, dont les changements et les innovations se succèdent à un rythme effréné. Grâce à l’attrait pour la nouveauté et la fascination qu’exercent les machines, cette exposition est un grand succès.
Face à ces progrès, le Prince Albert, promoteur de l’exposition ainsi que Cole, sont enthousiastes. Ils croient en la possibilité d’un monde meilleur grâce à l’essor et à la propagation des machines capables d’améliorer les conditions de travail et le niveau de vie des plus défavorisés, en réalisant plus rapidement et à moindre coût un nombre plus important d’objets de qualité. C’est donc une double promesse que fait la révolution industrielle. Elle fait miroiter tout d’abord une démocratisation de l’accès au confort domestique par la création de nouveaux types d’objets de qualité et à faible coût ; ensuite leur mode de production nourrit une seconde promesse, celle d’une société plus égalitaire grâce à l’amélioration des conditions de travail des ouvriers et de leur niveau de vie. Peu à peu, l’industrialisation se propose d’être le nouveau paradigme esthétique, économique et social. »