L’Odysée de l’écriture, arteTV : https://www.youtube.com/watch?v=6nxhAJmtnrk
Épisode 1
Épisode 2
Épisode 3
L’écriture, une “technologie de l’intellect”.
En guise d’introduction et d’arrière plan théorique, extraits de Jack Goody, « La technologie de l’intellect », Literacy in Traditional Societies, Cambridge Society Press, 1968, p. 1-26. Traduit par Jean-Claude Lejosne.
« Si l’on considère l’importance de l’écriture depuis cinq millénaires et devant l’importance qu’elle a prise dans notre vie à tous, il est étonnant que si peu d’attention ait été portée à la façon dont elle a influencé la vie sociale de l’humanité. Les études sur l’écriture ont tendance à n’être que le résultat de recherches historiques sur le développement des manuscrits, alors que les spécialistes de littérature se concentrent sur le contenu plutôt que sur les implications des actes de communication. Et tandis que, après la 2e Guerre mondiale, la recherche s’est surtout intéressée à l’influence des changements dans les modes de communication sur la société, la plupart des auteurs se sont penchés sur les développements ultérieurs tels que imprimerie, radio et télévision.
[…]
L’importance de l’écriture réside dans le fait qu’elle introduit un nouveau medium de communication entre les hommes. Elle permet avant tout de réifier la parole de donner à la langue un corrélat matériel, un ensemble de signes visibles. Sous cette forme matérielle, la parole peut se transmettre dans l’espace et peut être conservée dans le temps ; ce qui est dit et pensé peut désormais être mis à l’abri du caractère évanescent de la communication orale.
Il devient alors possible d’étendre très largement l’éventail des relations entre humains dans le temps et l’espace. Les potentialités de ce nouveau moyen de communication peuvent avoir un impact sur les activités humaines sous tous leurs aspects, politique, économique, juridique, religieux.
[…]
Mais l’écriture n’est pas une entité monolithique, une compétence faite d’un seul bloc ; ses potentialités dépendent du genre de système qui a cours dans telle ou telle société.
D’abord, le matériau se présente sous différentes formes, ce qui a des implications importantes. Les possibilités offertes par le papier dans l’administration sont supérieures à celles de la pierre ou de l’argile cuite. Plus important encore : il existe des différences significatives dans la forme graphique. Plus on fait appel au principe phonétique et plus le système sémiotique est souple. Avec l’avènement de l’alphabet, la parole elle-même peut être transcrite. La simplicité du système permet à une large part de la société de maîtriser la technique. La littératie démotique devient possible. »
L’ÉCRITURE CUNÉIFORME
“Cunéiforme” désigne la forme de clous ou de coins caractéristique de cette écriture.
C’est la plus ancienne écriture connue (-3400 env.), inventée par les sumériens, en Mésopotamie.
Sa forme et la technique utilisée pour l’inscrire est étroitement liée au matériau du support qui était utilisé : l’argile. Il était en effet difficile de tracer les courbes des symboles des premiers pictogrammes, c’était lent, peu précis et générait de petits résidus d’argile. Le geste spécifique obtenu avec l’usage d’un calame qui forme des clous et des droites était beaucoup plus rapide.




Maison des Sciences de l’Homme Monde
Cécile Michel, Directrice de recherche au CNRS, laboratoire ArScAn
Christine Proust, Directrice de recherche au CNRS, laboratoire SPHERE
[https://www.mshmondes.cnrs.fr/ecriture-cuneiforme-et-civilisation-mesopotamienne
Lucien-Jean Bord, Remo Mugnaioni, L’écriture cunéiforme, syllabaire sumérien, babylonien, assyrien, Librairie orientaliste Paul Geuthner S.A., 2002.
L’ÉCRITURE ÉGYPTIENNE

[Source : British Museum, https://www.britishmuseum.org/collection/object/Y_EA9900-6 ]
Tout le monde connaît les hiéroglyphes égyptiens. Mais ils n’étaient pas la seule forme d’écriture utilisée par les égyptiens. Deux autres formes d’écritures existaient également : le hiératique et le démotique.
Ces écritures servaient toutes à transcrire la même langue, ce qui les différencie est le contexte de leur utilisation.
L’écriture hiéroglyphique est essentiellement celle du sacré. Elle était le plus souvent gravée dans la pierre des monuments, ou tracée sur des papyrus au caractère exceptionnel comme le Livre des Morts. Très belle, mais très lente à exécuter, elle n’était pas utilisée pour les documents usuels de la vie quotidienne qui étaient rédigés en écriture hiératique. L’écriture hiératique est une simplification graphique des hiéroglyphes. Apparue beaucoup plus tard, vers -650, l’écriture démotique est à son tour une simplication du hiératique.



Évident pour nous aujourd’hui, le fait de représenter le monde par des signes abstraits a été le fruit d’une longue évolution. L’un des premiers témoignage de cette “invention” figure sur un vase en argile assez banal en tant que vase, mais dont le décor révèle une vision du monde toute nouvelle.

Ce vase a été découvert par l’archéologue Gunther Dreyer.
Sa décoration consiste en une représentation stylisée de la topographie des abords du Nil, les champs irrigués, et au delà, le désert et les montagnes. C’est le témoignage le plus ancien que nous connaissions de la représentation d’une chose qui n’est pas là, devant nous, dont la matérialité et l’échelle n’est pas accessible dans son ensemble à l’œil. Ce n’est pas encore une écriture, et encore moins un alphabet, mais une étape intermédiaire qui marque néanmoins une avancée considérable vers l’abstraction.
L’étape suivante est l’écriture syllabique ou écriture rébus qui consiste à attribuer un son à un pictogramme. Le même pictogramme peut alors aussi bien désigner l’objet auquel il renvoie que le son qui lui a été attribué, ce qui complique considérablement la lecture. (cf. usage des déterminants).
La première trace de ce type d’écriture a été repérée sur une tablette relatant le récit de la victoire du roi Narmer sur la Basse Égypte et les peuples du delta du Nil (victoire qui fera de lui le premier pharaon).
Cf. la légende des images pour comprendre.




Les écritures égyptiennes, BNF, les essentiels : https://essentiels.bnf.fr/fr/livres-et-ecritures/les-systemes-ecriture/bdf7550f-78f9-497f-85c5-e21c1dcadf2b-ecritures-dans-egypte-et-nubie-antiques/video/84f9ae3d-7ab7-46d2-9dc9-9e43069ca48e-ecritures-egyptiennes

David Diringer, The Alphabet. A key to the history of mankind, Hutchinson’s scientific and technical publication, 1953 (1948).

Gustave Lefebvre, Grammaire de l’Égyptien classique, 1955.
Catherine Chadefaud, L’Écrit dans l’Égypte ancienne, Hachette, 1993
SUPPORTS ET OUTILS DE L’ÉCRITURE
Le papyrus existait en plusieurs qualités, obtenues en fonction de la zone traitée de la plante (plus on se rapproche du cœur, plus la qualité est bonne). Ces différents types de papyrus étaient destinés à des usages différents : du papier pour les textes sacré vendu à la feuille, au papier d’emballage (vendu au poids).
Un document sur papyrus se présentait sous la forme de rouleaux, constitué par 20 feuillets environ collées entre elles.
Extrait video Papyrus



[Source : https://collections.louvre.fr/ark:/53355/cl010006537 – https://collections.louvre.fr/CGU]
Palette de scribe avec rangements pour pinceaux, calames et encre.
Le scribe passait son pinceau détrempé dans de l’eau mélangée à de la gomme d’acacia sur les pigments solides rouges et noirs contenus dans les cupules.

Modèle de lettre en hiératique du vizir Djéhoutymès au chef du trésor Imenhétep. Vers 1120 avant J.C. (Règne de Ramsès IX, XXème dynastie) – Éclat de calcaire (ostracon) – Musée du Louvre – E11178A

Bol en argile sur lequel est inscrit un acte de vente d’esclave, Écriture démotique, 664-610 av. J.-C.
Musée du Louvre, Département des Antiquités égyptiennes,
[source : https://collections.louvre.fr/ark:/53355/cl010008713]

Musée du Louvre, Département des Antiquités égyptiennes
[source : https://collections.louvre.fr/ark:/53355/cl010007767]
L’écriture se déployait sur une multitude d’espaces, d’objets et de surfaces. Elle occupait, sous sa forme hiéroglyphique, des murs entiers dans les monuments funéraires et figurait aussi sur les statuettes et les sarcophages. Mais on en trouvait aussi beaucoup sur les objets de la vie quotidienne (chevets de lit, objets de toilette, flacons à onguent, bijoux, amulettes, matériel de scribe, outils, armes, mobiliers). Elles indiquaient le plus souvent le nom de leur propriétaire, ses titres, ses fonctions, ou énonçaient des formules prophylactiques et des invocations.

[Extrait de Catherine Chadefaud, Écrire dans l’Égypte ancienne, Hachette,1993]




Les sceaux-cylindres sont des cylindres de pierre, gravés sur l’ensemble de leur surface, faisant apparaître un motif linéaire quand on les déroule dans l’argile fraîche. Ils apparaissent en Mésopotamie pendant la deuxième moitié du quatrième millénaire avant J.-C.. Ils remplacent les cachets plats dans l’authentification des scellements qui permettaient de sécuriser le stockage et le transport des marchandises.
Ils sont l’équivalent d’une signature, une trace spécifique à chacun permettant de compenser l’impersonnalité de l’écriture cunéiforme tracée par des scribes.
Objets de valeur transmis de génération en génération, ils étaient souvent portés épinglés ou en pendentif par leur propriétaire.

Enveloppe d’argile placées autour de certaines tablettes d’argile sur lesquelles on déroulait un sceau.
« Bulle d’argile », 2100-2000 av. J.-C.
LE PARCHEMIN ET LE CODEX

Conférence de Frédéric Dumas, parcheminier à Annonay, https://www.bnf.fr/fr/mediatheque/le-livre-matieres-premieres-le-parchemin
Why is the UK still printing its laws on vellum? (BBC news) https://www.bbc.com/news/magazine-35569281
Frédéric Bruly Brouabé
https://www.artpress.com/2022/07/04/frederic-bruly-bouabre-on-ne-compte-pas-les-etoiles/
https://journals.openedition.org/terrain/17473?lang=en
Écritures non déchiffrées, L’art de l’écriture, le courrier de l’Unesco, mars 1964. https://unesdoc.unesco.org/ark:/48223/pf0000061504_fre